Cela fait déjà un moment que je souhaitais écrire un billet sur la vie en Thaïlande. Il y a tellement à dire et tant d’histoires à raconter que je ne savais pas trop par où commencer. Et puis voilà, ces 2 derniers mois ont été une sorte d’apothéose qui résume parfaitement ce qui se passe dans ce pays, je me décide donc à t’en donner un aperçu avant de te parler de cette nouvelle recette d’encornets vapeur au citron, à l’ail et au piment, qu’on appelle ici: plamuk nung manao.
Histoire longue et douloureuse, clique sur le bouton ci-dessous si tu veux juste la recette 😆
La vie en Thaïlande
(histoire de février 2015, article remis à jour) Je n’ai pas vraiment cuisiné ces dernières semaines, je n’en ai eu ni le temps, ni l’énergie. Mais tout rentre dans l’ordre et si la vie se retransforme en un long fleuve tranquille, je pourrai, à nouveau, poster des recettes à un rythme plus soutenu.
La Thaïlande est un pays magnifique, c’est agréable et safe pour les vacances. Les touristes sont souvent sous le charme car les gens sont serviables et souriants, la nourriture est bonne, le soleil donne … et tout et tout ! Mais lorsqu’on y habite et qu’on y travaille, tu t’en doutes bien, c’est une autre histoire.
Actuellement, je suis engagée en tant qu’enseignante d’Anglais (conversation) dans un lycée du sud de la Thaïlande. Je travaille pour le gouvernement de la province, pour un projet qui vise à élever le niveau d’anglais dans sud de la Thaïlande en vue de l’ouverture des frontières en Asie (sur une échelle de 0 à 10, leur niveau actuel se situe aux alentours de -25).
Dans le cadre de ce projet, le gouvernement a engagé 40 enseignants étrangers. Comme personne ne veut se prendre la tête à gérer un groupe d’étrangers, ce même gouvernement a engagé un intermédiaire. Le gouvernement a donc un contrat avec une agence qui, à son tour, a un contrat avec moi.
L’agence me fournit un permis de travail et tous les documents nécessaires à l’obtention de mon visa. Ce dernier est valable une année. Jusque là, rien de bien étrange, me diras-tu …
En tant qu’étranger, on doit aller pointer au bureau local d’immigration tous les 3 mois. Début Février, je me rends avec Nan au bureau d’immigration pour mon pointage trimensuel.
Partie de l’histoire où les choses se compliquent
L’officier commence à discuter avec Nan et je comprends qu’il y a un problème. Je vois Nan se décomposer mais personne ne se donne la peine de traduire quoi que ce soit pour moi. Sachant qu’ils parlent de ma situation, je commence à chauffer.
Finalement j’ai droit à une explication résumée, l’officier du bureau d’immigration sort son plus bel Anglais et me dit : « Next time, visa cannot renew ».
QUOI ??? Mais qu’est-ce que tu me racontes là ?
Voyant que je perds patience, Nan se décide enfin à me dire que l’agence qui m’engage a une activité non déclarée et que toute demande de visa sera refusée. Cela signifie qu’il me reste 2 mois pour trouver une solution avant d’être expulsée du pays.
– Première étape : comprendre ce qui se passe. En Thaïlande, pour obtenir des informations, il faut faire jouer ses relations car personne ne s’abaisse à parler directement à un étranger ou à quelqu’un qu’il ne connait pas. T’as pas de relations haut placées ? T’es dans la merde !
Nan a passé des heures au téléphone avec tous ses copains de la police et du gouvernement pour finalement avoir les informations nécessaires : l’agence en question avait pour habitude de graisser la patte de tous les officiers pour l’obtention de nos documents officiels. C’est une pratique courante en Thaïlande, cela évite de passer trop de temps dans les administrations. Cela leur évitait aussi de faire les documents nécessaires à l’enregistrement d’un business et donc de payer tous les frais réglementaires ou les taxes.
C’est la panique !
L’année dernière, il y a eu un coup d’Etat. Le pays est maintenant dirigé par un gouvernement provisoire qui a pour but de le nettoyer de toute corruption. Tous les haut-fonctionnaires en charge des offices du sud ont été remplacés. Les nouveaux officiers en charge sont suivis de près : impossible (ou du moins plus difficile) de succomber à la tentation d’arrondir les fins de mois. Cela signifie, pour nous autres commun des mortels, une vie nettement moins chère mais bien moins facile.
Avant, il suffisait de sortir le porte-monnaie pour obtenir ce que tu voulais. Maintenant, il faut passer par toutes les étapes officielles et le système thaï n’a pas vraiment été prévu pour des gens qui respectent les lois. Pour revenir à mon agence, elle n’est pas enregistrée correctement et emploie 40 enseignants étrangers alors que légalement un maximum de 6 étrangers par école est autorisé.
En bref : j’ai réalisé que j’étais pas sortie de l’auberge
On a tenté de contacter le gouverneur de la province, il a répondu : « Nous sommes en règle, nous avons un contrat légal avec une agence. Ce qui se passe ensuite n’est pas notre problème. » Tu connais la tactique de l’autruche ? Ici, ils sont tombés dedans quand ils étaient petits !
Une collègue trop top !
Par chance, une de mes collègue s’est mise en tête de m’aider à clarifier la situation. Je te fais un résumé de ce qui s’est passé ces 2 derniers mois :
L’immigration a dit que la seule solution pour moi était d’obtenir un permis de travail de la part de mon lycée et non de la part de l’agence.
Pour obtenir ce permis de travail, j’ai dû faire une demande de license d’enseignant.
Pour obtenir cette license, il m’a fallu un contrat de l’école (qu’on a falsifié puisque l’école n’est pas mon employeur) et il me fallait aussi suivre un cours de culture thaïe. Mais …
ce cours de culture thaïe a été supprimé jusqu’à nouvel avis, il n’est donc pas possible d’obtenir une license d’enseignement en Thaïlande … Tu vois le genre !
Du coup j’ai obtenu une recommandation provisoire dans le but d’obtenir un nouveau permis de travail. Tous cela a pris 3 semaines.
Nous avons préparé des tones de documents puis nous nous sommes rendus à l’office du travail pour établir un nouveau permis de travail. Comme de bien entendu, il y a eu un hic : l’officier nous a expliqué qu’il ne pouvait pas délivrer un permis de travail au nom de mon lycée puisque ce n’est pas le lycée qui paie mon salaire !
Et hop, retour à la case départ.
MAIS POURQUOI VEULENT-ILS SUPPRIMER LA CORRUPTION? c’était tellement plus simple avant ! Pour une centaine d’euros, tu obtenais tout ce que tu voulais !
Tout est bien qui finit bien ! 👍
Après des heures et des jours de crises, après des milliers de coups de téléphones, ma fantastique collègue a trouvé une brèche dans le raisonnement de ces fonctionnaires, on a foncé dans le tas (elle toujours polie et souriante et moi comme un pitbull enragé) et j’ai finalement obtenu mon permis de travail (au nom de l’agence pourrie mais avec endorsement de mon lycée) puis avec les documents de l’agence + tous les documents de mon lycée + le soutien en personne de mon directeur, j’ai pu renouveler mon visa pour une année, au grand mécontentement des officiers de l’immigration qui n’ont pas trouvé de faille dans mon dossier. On peut dire qu’il me l’ont donné à contre-coeur.
Avec tout ça, j’ai obtenu mon visa il y a 4 jours … et là, ça m’a donné les crocs.
On fonce au marché !
Moi qui n’avais pas eu le 💕 à cuisiner ces derniers temps, j’ai foncé au marché, je suis tombée sur un jour d’opulence au marché des poissons. Nez à nez avec des superbes raies aigles qui seraient mieux sous l’eau que sur des étals, des bébés requins à pointe noire qui n’arrivent que sous la forme de bébé tellement les adultes ont été sur-pêchés et plein d’autres poissons en tout genre dont quelques uns que je n’avais jamais vu auparavant. Y en avait un tout plat (comme un platax) avec une monstre bosse sur la tête, il était pas beau mais la marchande a tout de même essayé de me le refourguer. Je me méfie toujours lorsque les marchands sont trop insistants, c’est soit un poisson super cher, soit un poisson que personne d’autre ne veut 😂.
J’avais en tête d’acheter du crabe mais c’était sans compter que pour le crabe, il faut arriver au marché avant 8h. Trop tard !
Du coup, je me suis rabattue sur des encornets. Ils étaient beaux (et sentaient bon le sable chaud) et frais et je les ai tout de suite imaginés dans mon assiète en salivant et parlant toute seule (comme d’habitude).
D’autres recettes avec du calmar :
La recette d’encornets vapeur au citron, à l’ail et au piment, enfin !
– Cette recette de calmar se prépare traditionnellement avec du poisson (pla neung manao). On cuit généralement un poisson entier à la vapeur et on le recouvre de cette délicieuse sauce au citron.
– Pour cette recette, j’ai utilisé 8 piments, c’est une dose de piquant qui convient à mes goûts : juste assez, pas trop. Je n’utilise que les rouges car il est ainsi possible de différencier les morceaux de piments des herbes aromatiques, cela évite les mauvaises surprises. (il faut toujours se méfier des piments verts qui se cachent dans un plat).
Si tu veux préparer une recette thaïe authentique, il faut augmenter la dose de piments. Tu peux compter une grosse poignées, entre 20 et 30 pièces. Pour moi, c’est mangeable mais je n’apprécie plus vraiment les saveurs du plat.
– Là, je n’ai préparé que les chapeaux des encornets car j’avais envie de préparer les tentacules autrement mais tu peux tout aussi bien ajouter les tentacules dans le panier de cuisson à la vapeur.
Si tu veux des infos sur la manière de nettoyer et préparer tes calmars, tu peux regarder cette vidéo : préparation des encornets
Le temps de cuisson dépend de la taille des calmars. Ils faisaient 15cm de long (chapeaux seulement) et je les ai cuits durant 15 minutes.
Encornets vapeur au citron, à l’ail et au piment – pla muk nung manao
Ingredients
- 500 g d’encornets de taille moyenne
- 8 branches de céleri chinois
- 4 bâtons de citronelle
- 6 cm de galanga frais
- 1 petit bouquet de coriandre fraîche avec les racines
- 4 oignons verts (ciboules)
- sel et poivre
Pour la sauce au citron vert :
- 4 c. à soupe de sauce de poisson
- 4 c. à soupe de jus de citron vert
- 2 c. à café de sucre
- 4 gousses d’ail
- 8 piments rouge ou plus
Instructions
Prépare la sauce :
- Lave les racines de coriandre et hache-les finement.
- Hache finement l’ail et les piments.
- Mélange le reste des ingrédients dans un bol et ajoute les racines de coriandre, l’ail et les piments.
Prépare les calmars :
- Nettoie et prépare les encornets : vide-les, lave-les et pèle-les (ou pas)
- Entaille les encornets dans le sens de la largeur (sans les couper complètement)
- Lave 5 branches de céleri chinois et de quelques branches de coriandre.
- Nettoie les bâtons de citronnelle, coupe les feuilles et écrase ces bâtons dans un mortier (cela permet de mieux diffuser les arômes).
- Nettoie le galanga sous l’eau courante en le frottant avec une cuillère. Coupe-le en tranches dans le sens de la longueur.
- Garnis le fond du panier à vapeur avec le galanga, la citronnelle, le céleri et la coriandre.
- Dépose les encornets sur la garniture aromatique. Sale et poivre
Cuisson :
- Cuis à la vapeur durant 15 minutes (varie en fonction de la taille des encornets).
- Sur un plat, dépose un mélange de coriandre, céleri chinois et oignons verts hachés grossièrement. Place les encornets au centre du plat et arrose-les généreusement de sauce.
- Sers sans attendre.
Merci pour cette délicieuse recette. Testée et approuvée hier soir! Je n’avais pas de coriandre, alors je l’ai remplacée par de la menthe!!
Merci pour votre blog!!
Quelle histoire Kris !!! Y a de quoi faire des insomnies Oo !
Je suis d’ac avec Patrick, on a tout intérêt à ce que tu restes dans ce beau pays 😉
Ouf.. c’est reparti pour une année !
En effet ce punctata n’a rien d’accueillant ! cela dit, notre St Pierre breton n’a rien à lui envier avec son délit de sale gueule, à part ,bien évidemment, que l’habit ne fait pas le moine et qu’il est bigrement délicieux ^^
ça me peine de lire que tu peux trouver des raies aigles… ! on est vraiment entrain de vider la mer ! des bb requins.. rien d’étonnant les plus gros sont déjà partis dans les filets ! j’ai visionné une émission récemment à ce sujet… tout le monde s’en fout du requin, personne ne l’aime (à part en soupe ou en poudre !). Spielberg ne lui a pas rendu la vie facile au squale ! on peut dire que çà lui colle à la peau cette image de tueur ! et ça arrange bien tout le monde aussi ! 100 millions tués chaque année dans le monde !!! toutes tailles confondues…
Bon j’arrête mon coup de gueule, midi arrive, et quand je vois tes encornets posés si délicatement dans toute cette verdure, je me dis : « faut que je fasse à manger ! mioum mioum ! »
Plein de becs ma poule !
Contente que tout soit rentré dans l’ordre ! 😉
Sandy xxx
Bah tu vois, entre le moment où j’ai écrit mon histoire et maintenant, j’ai réussi à changer de boulot (du coup faut que je recommence toute la chaine d’embrouilles pour obtenir un permis de travail). Je travaille directement pour l’école pour une durée indéterminée. (déménagement et new job en l’espace de 2 semaines… pffffff) Cela représente la fin de mes soucis et un visa qui se renouvelle automatiquement chaque année ! OUF !
Surtout te gênes pas, chaque fois que tu veux pousser un coup de gueule pour la protection des océans, tu es la bienvenue ici ! Effectivement, le public ne se sent pas vraiment concerné parce qu’on ne voit pas les dégâts directs. Mais c’est vraiment alarmant.
Je t’envoie des gros becs tout gluants (car il fait tellement chaud quant colle de partout)
A tout bientôt
Kris
Rien n’est pire que des fonctionnaires zélés qui t’entraînent dans leurs méandres kafkaïens, et cela sous toutes les latitudes. C’est clair que changer complètement leurs habitudes de pourboires ne mes incite pas à la compréhension, d’autant que je gage que leurs traitements n’ont pas été augmentés.
Ça aurait été dommage qu’on t’expulse, tu aimes vraiment le pays où tu travailles, et tu nous en extrait de jolis morceaux comestibles.
Ce ne serait pas un poisson napoléon, le bossu, ou une variété de poisson perroquet ?
Effectivement, les salaires des fonctionnaires thaïs sont vraiment bas et tu as raison, ils n’ont pas augmentés. En même temps, ils travaillent au rythme de l’escargot avec un manque d’organisation désarmant … une augmentation de salaire semble difficilement justifiable 🙂
Anyways !
Quant au poisson, ce n’est n’est pas un poisson commun de récif, je ne l’ai jamais croisé sous l’eau et je ne l’avais jamais vu avant. J’ai fini par l’identifier, il s’agit d’un epane punctata (spotted sicklefish en Anglais). Voici sa photo.
Poisson inconnu pour moi…